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Le TDAH, du fardeau au cadeau
Le TDAH n’est pas seulement une liste de difficultés à surmonter, c’est aussi un mode de fonctionnement unique à apprivoiser. Derrière l’agitation, l’oubli ou l’impulsivité se cache une énergie rare, précieuse et créative. Lorsqu’on apprend à canaliser cette Ferrari intérieure, elle peut devenir un véritable moteur de passion, de force et d’excellence.
Étourderies, oublis, maladresses, agitation, impulsivité, émotions débordantes, ajoutez à cela un peu d’anxiété, un manque de confiance, des échecs scolaires et des punitions à répétition cela donne un petit goût de métal dans la gorge rien que d’y penser. Le TDAH : trouble déficitaire de l’attention avec ou sans hyperactivité. Il touche 7% de la population mondiale, c’est donc un mode d’emploi plutôt répandu… Un fonctionnement à apprivoiser le plus tôt possible pour pouvoir relever les défis de l’existence et optimiser cette singularité dont on ne pourrait plus se passer une fois adoptée. J’aime expliquer aux enfants qui viennent me voir qu’ils sont au volant d’une Ferrari qu’ils ne savent pas conduire… Il manque de maîtrise, ils vont trop vite, ils foncent dans les murs, voire dans les gens… Mais une Ferrari, c’est plutôt un beau bolide, c’est rare, précieux et hyper puissant… Le TDAH, c’est pareil… et ça c’est plutôt une bonne nouvelle !
L’erreur serait de victimiser ces pauvres petits qui sont punis toute la journée… « Ce n’est pas de sa faute, il a un TDAH ». Ce serait vraiment sous-estimer ce qu’ils ont sous le capot ! Comprendre comment ça marche est la première étape… L’ennui est quelque chose d’insupportable… L’enfant, l’ado, l’adulte atteint de TDAH cherchera toujours autour de lui le truc le plus intéressant… et pas de bol, ce n’est pas toujours le prof… Le besoin de stimulation est au cœur de ce mode d’emploi… Des sensations fortes, de la passion, du défi, de l’émotion, de l’action, de la création, de la communion… Voilà ce qui répare le cerveau en désordre… A chacun de trouver ce qui nourrit cet appétit de découvrir le monde : l’escrime , l’aquarelle , le violoncelle, le street art, le kite surf, la pâtisserie, l’apiculture, la photographie, les sudoku… Lorsqu’on tombe amoureux d’une discipline, et qu’on a la chance d’avoir un TDAH, alors on s’y donne corps et âme et on touche à la grâce et souvent l’excellence. Par contre, si ça n’est pas intéressant et que c’est contraignant, il sera plus compliqué de se mobiliser… Et cela n’est pas vraiment de la paresse… C’est
comme devoir rouler à 30 à l’heure avec une Ferrari… c’est difficile… mais c’est possible. On peut donc rendre ces tâches amusantes en y ajoutant du jeu ou du défi… Pour les adultes, on peut les déléguer pour passer un maximum de temps dans sa zone de compétence.
Quand aux étourderies… Les devoirs oubliés, les pertes multiples qui toutes additionnées pourraient me payer des vacances aux Caraïbes pendant des mois… Aujourd’hui, après avoir testé de multiples systèmes, je pense qu’il y a un ingrédient essentiel : l’autodétermination. A un moment donné, soit on désespère, soit on réagit… L’autodétermination c’est cette motivation interne nous permet plus que tout de relever nos manches pour arrêter de jouer au petit poucet avec nos affaires, nos idées et nos obligations… A chacun de trouver l’outil qui lui convient : le bullet journal, les systèmes de rappel, les tâches notées dans l’agenda, le minimalisme,… L’hyperactivité quant elle n’est pas canalisée peut être très agaçante… Cette sensation d’avoir des puces dans son pantalon et de brasser de l’air… C’est pourtant un super pouvoir, c’est de l’énergie bonus… Y en a qui payent de la drogue pour ça ! Une fois qu’on en a conscience, on peut l’exploiter pour la mettre au service de sa vie… Je connais des hyperactifs qui ont des jardins qui n’ont rien à envier à Versailles, des enfants champions de skateboard, d’autres sont accros au jogging ou au vélo… Dire à un hyperactif « arrête de bouger », cela revient à dire « arrête de cligner des yeux »… C’est faisable, mais pas sur la longueur et surtout au détriment du reste…
Et enfin l’impulsivité, cet ingrédient tellement envahissant du TDAH… Je n’ai pas toujours été en paix avec cette partie de moi… Dire tout ce que je pense ou tenter de me dominer en me retenant de toutes mes forces pour quand même finir par exploser encore plus fort par la suite… Ce n’est pas facile et c’est tellement frustrant… car contrairement à ce qu’on croit, on essaye de se contrôler… J’ai la chance d’être très entourée dans ma vie et ce que les gens aiment chez moi, c’est ma générosité, mon authenticité et ma spontanéité… Ne serait-ce pas cela les trésors que nous apportent l’impulsivité ? Décider d’aimer ça me fait moins déborder… Être en paix et accueillir ma colère, ma peur ou ma tristesse sans la contenir me permet de l’exprimer de façon plus juste, même si cela reste mouvementé par moment. Mais je ne considère plus mes émotions comme des ennemies, au contraire, elles sont ma petite boussole intérieure qui me raconte que quelque chose ne me convient pas et cela me permet de m’ajuster. Quelle chance d’avoir pu apprendre à danser avec chacune d’elles. On peut lire aujourd’hui des choses affolantes autour du TDAH, l’idée n’est pas de
minimiser les souffrances et les troubles adaptatifs qu’il engendre. La vie restera un challenge, mais ne l’est-elle pas pour nous tous ? Accepter qu’elle ne soit pas parfaite et que les épreuves en font partie c’est un bon début. Et puis faire confiance aux ressources de vos enfants, de vos élèves, de vos patients pour la traverser est le plus beau des cadeaux. Cette confiance reçue, on la garde au creux de soi toute sa vie et elle nous permet d’en faire de la magie.